La notion de bien-être au travail
L’émergence de la notion de bien-être au travail a connue de multiples phases d’évolutions, particulièrement depuis ces vingt dernières années ; mais les problématiques et usages relatifs à la santé mentale au travail se sont surtout cristallisés depuis la reconnaissance des « risques psychosociaux » par le Ministère du travail dans le rapport Gollac, en 2011. Les risques psychosociaux étant : “ les risques pour la santé mentale, physique et sociale, engendrés par les conditions d’emploi et les facteurs organisationnels et relationnels susceptibles d’interagir avec le fonctionnement mental ».
Ensuite, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit la santé mentale comme étant « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». Ainsi, la santé mentale devient une composante importante dans le domaine de la santé publique et de la prévention.
Avec près de 60% de la population mondiale détenant un emploi, le travail constitue une composante importante de la vie des individus. Le mal être ou le bien-être au travail impacte ainsi nécessairement l’individu. Un cadre de travail heureux permet en outre de bénéficier d’un moyen de subsistance, de ressentir un sentiment d’accomplissement, de déterminer des buts, de faire partie d’une communauté, ou encore de bénéficier de relations positives.
Un travail décent peut ainsi contribuer au rétablissement et à l’inclusion des personnes souffrant de problèmes de santé mentale à priori, et leur donner l’opportunité de retrouver un fonctionnement social. A contrario, un environnement toxique impactera négativement et parfois gravement l’individu.
La santé mentale au travail : état des lieux en France et à l’étranger
La santé mentale au travail en quelques chiffres…
Selon le dernier rapport de la Fondation Pierre Deniker, 22% des Français actifs présentent un trouble mental. Un phénomène qui touche davantage les femmes : à 26%, contre 19% pour les hommes ; ainsi que les métiers ‘relationnels’ : 28%, contre 19% pour les autres. Pour cause, des responsabilités toujours plus importantes à mener tant sur le front professionnel que personnel. Selon l’OCDE, sur 4 travailleurs présentant un trouble mental, 3 font état d’une baisse de leur productivité, avec des absences toujours plus fréquentes : près de la moitié des demandes de pensions d’invalidité sont motivées par une mauvaise santé mentale.
Entre 50 et 70% des personnes concernées ne reçoivent aucune aide au travail.
La santé mentale au travail selon le droit français
La santé mentale au travail est encadrée par le droit français, qui définit les droits, les devoirs, et les obligations relatifs aux employeurs et salariés, ainsi que les sanctions en cas de manquements ou d’abus.
Le code du travail prévoit une obligation générale de sécurité, incombée à l’employeur (article L. 4121-1 du Code du travail) : il doit évaluer les risques, y compris psychosociaux, et prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés. Ces mesures comprennent des :
- Actions de prévention des risques psychosociaux : harcèlement moral, harcèlement sexuel, violences psychosociales…
- Actions d’information et de formation
- Mise en place d’une organisation et des moyens adaptés
Pour prévenir les risques psychosociaux, deux accords nationaux interprofessionnels ont également été signés unanimement par les organisations patronales et syndicales :
- L’accord national interprofessionnel sur le stress au travail du 2 juillet 2008 (transposition de l’accord européen du 8 octobre 2004 étendu par arrêté ministériel le 23 avril 2009) ;
- L’accord national interprofessionnel sur le harcèlement et la violence au travail du 26 mars 2010 (transposition de l’accord européen du 26 avril 2007 étendu par arrêté ministériel le 23 juillet 2010 sur le stress au travail).
- L’accord national interprofessionnel du 19 juin 2013 concernant la qualité de vie au travail et l’égalité professionnelle
Ces accords ont notamment pour objectif d’informer les employeurs et de leur rappeler leur responsabilité et leurs obligations concernant les repères de prévention des risques psychosociaux, et les démarches à suivre : la prévention des risques psychosociaux s’inscrit aujourd’hui dans l’obligation générale de protection de la santé physique et mentale des travailleurs.
La santé mentale au travail depuis la crise du covid-19
La crise sanitaire du Covid-19, les confinements successifs et l’expansion du télétravail ont engendré une dégradation majeure de la santé mentale au travail dans le monde.
La santé mentale des travailleurs a perdue 10 points par rapport à 2016. Cette situation serait liée à différents facteurs : des mauvaises conditions de travail avec le télétravail, l’augmentation du chômage, la diminution de la motivation… En particulier pour le personnel soignant, en première ligne de la pandémie, et déjà à l’origine fortement impacté par le stress et la pression du milieu hospitalier.
- 35 % des personnes interrogées déclarent avoir souffert d’isolement
- 1 tiers a rencontré des difficultés familiales ou financières
- 29 % des salariés ont ressenti davantage de stress du fait de la crise
- 14 % déclarent avoir développé des habitudes addictives.
- 30% des arrêt de travail entre janvier et mai 2021.
D’autres part, les gouvernements n’étaient pas préparés à l’ impact de la crise sanitaire sur la santé mentale : en 2020, les gouvernements du monde entier n’ont consacré en moyenne que 2% des budgets de santé à la santé mentale, et les pays à revenu moyen inférieur moins de 1%.
Un enjeu public international
On estime à 12 milliards les journées de travail perdues chaque année pour cause de dépression ou d’anxiété, ce qui représente près de 1000 milliards de dollars pour l’économie mondiale. Les directives mondiales de l’OMS sur la santé mentale au travail recommandent en ce sens des mesures pour lutter contre les risques psychosociaux, telle qu’une formation des dirigeants, afin de renforcer leur capacité à prévenir et agir pour le bien-être des salariés.
Pourtant, débattre de la santé mentale au travail reste encore tabou dans les milieux professionnels du monde entier. L’Atlas de la santé mentale de l’OMS indique que seuls 35 % des pays disposent de programmes nationaux de promotion et de prévention de la santé mentale liée au travail. L’enjeu est également de la responsabilité des entreprises, avec une effective mise en application.
Les risques psychosociaux au travail
Au travail, les risques pour la santé mentale, également appelés risques psychosociaux sont nombreux, et sont caractérisés entre autres par :
Les exigences au travail
L’intensité et la complexité du travail peuvent être un facteur de mal-être pour les employés. Cela implique :
- Délais et des objectifs manquant de clarté ;
- Surcharge des tâches professionnelles ;
- Intensification des horaires ;
- Interruptions régulières ;
- Horaires prolongés, rigides, parfois incompatibles avec la vie sociale
Les exigences émotionnelles
Au cours de son activité professionnelle, le travailleur peut être confronté à des relations difficiles à gérer émotionnellement avec ses différents interlocuteurs, et la nécessité de masquer ses émotions réelles.
Le manque d’autonomie
Parmi les facteurs déterminants dans le développement des risques psychosociaux, se trouve le manque d’autonomie. Cela se traduit par :
- Marges de manœuvre faibles dans la réalisation des tâches ;
- Rythme de travail contraignant ;
- Sous-utilisation des compétences du travailleur ;
- Manque de moyens
L’insécurité de la situation de travail
Les changements de type : précarité d’un contrat, retards dans les versements de salaires, les changements de qualification ou de métier sans formation, etc ; jouent un rôle dans l’insécurité de la situation de travail et des risques psychosociaux.
Les relations de travail insatisfaisantes ou toxiques
Des relations de travail insatisfaisantes ou toxiques peuvent être déterminantes pour la santé mentale des salariés. La présence de relations sociales et la qualité des interactions sont importantes pour une bonne ambiance de travail et un cadre de travail agréable. Dans le cas contraire, cela constitue un risque psychosocial. Il peut s’agir de :
- Conflits entre collègues
- Conflits de valeurs
- Absence de relations sociales
- Management tyrannique
- Harcèlement, violences, abus
Les conséquences des risques psychosociaux au travail
Un impact sur la santé
Les risques psychosociaux au travail peuvent impacter significativement la santé mentale des employés, et même la santé en général. Les risques sont nombreux :
- Burnout / épuisement professionnel
- Dépression
- Troubles anxieux
- Suicide
- Maladies cardio-vasculaires
- Troubles musculosquelettiques
- Aggravation ou rechutes de maladies chronique
- …
Un impact sur l’entreprise
Les employés sont une composante essentielle pour une entreprise. La perte d’un ou plusieurs employés, ou le mal-être de ces derniers se fait nécessairement ressentir au sein de l’entreprise avec :
- Turn-over (abandon de poste, absentéismes, démissions, arrêts maladies…)
- Dégradation de l’ambiance de travail
- Perte de productivité
- Impact sur l’image de l’entreprise
Un coût social élevé
D’après l’Institut national de recherche et de sécurité, le coût social du stress au travail est estimé entre 1,9 et 3 milliards d’euros en France. Cette évaluation comprend le coût des soins et la perte de richesse dû à l’absentéisme de cessation prématurée d’activité et de décès prématuré.
Prévenir les risques psychosociaux au travail
Les risques psychosociaux peuvent toutefois être prévenu afin de préserver la santé mentale des employés. C’est notamment le rôle des RH au sein de l’entreprise de :
Identifier et évaluer les risques psychosociaux
Il est possible de prévenir les risques psychosociaux tout d’abord en les identifiant, pour ensuite agir. Les signaux identifiables peuvent être entre autres l’absentéisme, les difficultés face à des problématiques « simples », de nombreux congés posés d’un coup, un retrait lors des discussions entre collègues et réunions, un isolement…
Les risques psychosociaux peuvent en outre être évalués par le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUER), un outil obligatoire et prévu par la loi, que l’employeur doit utiliser pour évaluer les risques psychosociaux de son entreprise. Il y a également les outils de sondages des collaborateurs, tels que Poplee Engagement, qui permettent aux entreprises d’obtenir des feedbacks précis, en temps réel, et personnalisés sur le ressentis des équipes.
Sensibiliser à la santé mentale au travail
Ensuite, sensibiliser les employés peut constituer un levier important pour lutter contre les risques psychosociaux. Il peut s’agir de :
- Proposer des programmes de sensibilisation
- Informer sur les risques
- Inciter à parler
- Proposer un accompagnement (psychologie du travail, médecin du travail…).
Pratiquer un management souple et bienveillant
Le management est un des leviers principaux pour améliorer le bien-être au travail. Cela peut se traduire par :
- Mettre en place des aménagements tels que le télétravail
- Favoriser la discussion avec ses employés
- Avoir une attitude adéquate : respecter la parole et le point de vue de ses employés, savoir se remettre en question, avoir confiance en ses collaborateurs, être tolérant, patient, compréhensif
- Bien répartir de la charge de travail entre les équipes
- Soutenir, autonomiser et valoriser le travail de ses employés
Créer un environnement de travail agréable
Un cadre de travail harmonieux et agréable représente un atout pour une entreprise. Cela permet aux employés de se sentir bien, confortables, et dans de bonnes conditions de travail. L’environnement de travail peut toutefois être améliorer par des décorations, avec des plantes notamment, qui possèdent de nombreuses vertus et favorise le bien-être ; un mobilier confortable, un matériel fonctionnel, un éclairage et un chauffage optimal, pas de nuisances sonores…
Favoriser le travail d’équipe
Favoriser le travail d’équipe en entreprise permet d’encourager les échanges entre collègues et à fortiori, d’ améliorer l’ambiance de travail. C’est l’occasion de faire connaissance, et de développer éventuellement de nouvelles compétences. Le travail d’équipe encourage les interactions sociales, et par extension améliore l’ambiance au sein de l’entreprise.
Organiser des évènements d’entreprises
L’organisation d’évènements d’entreprises sont également l’occasion d’améliorer les relations entre collègues et de faciliter les échanges. C’est une bonne solution si les employés souffrent de solitude, par exemple. Il peut s’agir de :
- Petits déjeuners
- Afterworks
- Séminaires d’entreprise
- Jeux d’entreprise
- …
Informer les bénéficiaires d’aides à l’emploi
La précarité salariale est un sujet qui peut impacter significativement la santé mentale des employés. Afin de lutter contre ces risques psychosociaux et aider les employés en situation de précarité et face à l’insécurité de l’emploi, le gouvernement et les corporations prévoient des aides à l’emploi. Pour en savoir plus : Aides à l’emploi en 2023 : quelles nouveautés ?
Recruter un Chief Happiness Officer ?
Créé au début des années 2000, au sein de la Silicon Valley, le Chief Happiness Officer fait sa première apparition chez Google et autres start-ups. On comprend grâce à de multiples études sur le sujet, que la productivité et l’efficacité des employés en entreprise est lié au bien-être et au bonheur des salariés. C’est le rôle du « Chief Happiness Officer » : assurer le bien-être au travail. Les fonctions du CHO vont plus loin que le DRH classique, et intègre des dimensions plus créatives en s’intéressant notamment :
- Conditions matérielles de travail
- Activités team-building
- Organisation du temps de travail
- Marketing et la communication
- Instaurer une culture de travail positive
Bien que son usage soit controversé et jugé désuet par certains, le recrutement d’un CHO représente toutefois une solution envisageable par une entreprise qui en éprouve le besoin.
Les traitements possibles à la suite d’un burn-out
En cas de situation de burn-out ou à la suite d’un burn-out, il est possible de mettre en place des solutions, par la personne souffrante pour assurer son bien-être personnel, mais aussi par l’entreprise. Il peut s’agir de :
L’aménagement du temps de travail
L’entreprise peut décider de mettre en place un aménagement de temps de travail et la possibilité de télé travailler à court, moyen, ou à long terme, par exemple, afin de permettre à un salarié en retour de poste de se sentir plus reposé.
L’arrêt de travail
En cas de mal être et de burn-out, il est nécessaire de prendre le temps de se reposer et de se soigner. L’arrêt de travail se décide en réseau avec le médecin du travail, le médecin traitant, les spécialistes (psychothérapeute, psychiatre,) et le médecin conseil de l’assurance maladie.
La réorientation professionnelle
Un burn-out peut constituer une prise de conscience d’un environnement inadéquat pour soi, et représenter ainsi un tremplin pour se réorienter professionnellement. Il peut s’agir d’un changement d’entreprise, ou encore d’un changement de secteur d’activité.
Prendre soin de soi
A la suite d’un burn-out, il est essentiel de prendre soin de soi pour se sentir mieux et favoriser un bon fonctionnement physique et mental. Effectuer une activité physique ou de relaxation, dormir suffisamment et s’assurer une bonne alimentation sont des leviers importants pour améliorer son hygiène de vie.
Entreprendre une thérapie
L’approche thérapeutique est une solution de guérison à la suite d’un burn-out. De nombreuses thérapies sont possibles : ICV, TCC, hypnose, thérapies brèves, psychothérapie…
Le management de transition au service du bien-être en entreprise
Un rôle de « pompier »
Le manager de transition arrive très souvent dans un contexte de tension, et grâce à son œil extérieur, sa position neutre et ses qualités relationnelles, réussit à faire parler les personnes entre elles, à dénouer les problèmes et à apaiser le climat.
Dans quasiment toutes les missions, le manager de transition intervient dans un contexte organisationnel complexe. Dans 90% des cas, il gère des équipes, et est confronté à des souffrances de la part des salariés. Il fait le pompier dans un premier temps et essaie surtout de trouver des solutions pérennes à mettre en place pour passer le relais ensuite à un manager interne à l’entreprise, dans un contexte apaisé.
Un rôle préventif
Parfois, l’entreprise peut vouloir anticiper la crise et prévenir les risques. Le recours à un manager de transition permet de prévenir des situations de stress auprès des équipes, et ainsi préserver la santé mentale des salariés. Par exemple, à la suite d’un départ d’un manager, dans un service déjà tendu ; le recrutement d’un remplacement peut prendre plusieurs mois, et les équipes se trouvent alors souvent livrées à elles-mêmes. Recruter un manager de transition peut être la solution.
Le cabinet de management de transition Momen propose un portefeuille de managers expérimentés pour gérer tout type de situation, notamment la gestion de crise.
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