Retour d’expérience sur la transformation réussie d’une entreprise textile : Françoise Saget | Interview Vidéo Nathalie Varenne-Meyer – Directrice Générale

Interview écrite résumée | Transformation digitale d'entreprise

Quel a été votre chantier principal en arrivant à la direction de l’entreprise en 2019 ?

Je dirai que ce n’est pas vraiment un chantier mais il y a eu des chantiers qui ont décliné de cette mission. Je suis arrivée dans un climat assez compliqué où l’entreprise qui avait toujours été rentable, avait vécu une année 2018 difficile. C’était la première fois que l’entreprise perdait un peu d’argent donc je suis arrivée dans un climat d’inquiétude. Ma mission a été de réenchanter le business.

Pour réenchanter le business, j’ai voulu donner à tous les salariés de l’entreprise une vision claire de là où on va et comment on va y aller. En arrivant dans cette entreprise j’ai remarqué qu’ils étaient un peu perdus étant donné que l’entreprise avait un business model de vente à distance classique, traditionnel, très orienté « papier » et pas très efficace avec le digital qui croit de plus en plus. Suite à cela j’ai travaillé avec toute l’équipe sur « qui sommes-nous ? » parce qu’à un moment dans une entreprise, lorsque des personnes ont perdu leurs repères, il faut leur faire travailler sur leur identité. Nous avons travaillé tous ensemble sur le positionnement stratégique de la marque ; ce travail a rassemblé les équipes et nous sommes arrivés à une baseline de Françoise Saget qui est « cultivons la joie intérieure », qui est vraiment l’ADN de la marque. Ce claim a été reconnu et validé par les salariés, les clientes, la direction et l’actionnaire, donc ça a vraiment eu comme effet de donner une vision.

Une fois que tout cela a été assis, il y a eu des changements d’organisation ; le digital était sous staffé et avec des juniors. On a créé dans le groupe une digital factory et il y a eu mutualisation des compétences en interne ce qui a également permis d’accélérer sur le digital. On a continué à moderniser le style produit, la plateforme de marque, la plateforme de style et pousser la fidélisation sur le digital en accélérant sur le CRM en digital (Customer Relationship Management). Mais la mission essentielle était de réenchanter le business, expliquer aux salariés qu’on allait faire moins de commandes mais celles qu’on allait faire seraient plus rentables. Il a fallu changer le mindset et leur expliquer que le business model était en évolution.

Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées pour mener à bien ces objectifs ?

L’entreprise était une machine de guerre construite pour l’optimisation de la vente à distance traditionnelle-papier, avec des équipes excessivement professionnelles et performantes, habituées à travailler dans le détail de leurs actions, mais sans une vision d’ensemble partagée par toutes les équipes. Ceci a été l’un des premiers écueils donc j’ai créé immédiatement un comité opérationnel tous les lundi matin à 9h30 avec les responsables de chaque service et on partageait les succès de la semaine passée, les problèmes et les enjeux de la semaine à venir. Au début les personnes n’avaient pas très envie de participer mais petit à petit ils ont compris qu’enfin ils échangeaient en direct avec leurs collègues, qu’ils étaient au courant des détails qu’ils n’auraient peut-être jamais su, et ils ont constaté que ça améliorait l’efficacité de leur travail et donc les résultats. Pendant la covid, on a été obligé d’arrêter ces réunions et à un moment les équipes ont éprouvé le besoin de les refaire donc nous avons continué à faire ces réunions mais par Teams.

Donc les écueils c’étaient réellement des équipes super professionnelles mais chacune dans leur coin, un manque de vision globale, un manque de cohésion, et l’équipe digitale sous staffée. Mais tout le monde était prêt au changement ce qui était vraiment très fort. Les équipes attendaient ces changements et l’ont accueilli au départ avec un peu de suspicion ce qui est normal, mais une fois qu’elles ont été embarquées ça a tout de suite fonctionné.

Quelles ont été les clés de succès ?

Les clés de succès c’est comme dans la vie personnelle. Si nous ne savons pas qui nous sommes, ce que nous voulons et où nous allons, pour une marque c’est similaire, nous ne pouvons pas évoluer. Il faut vraiment effectuer un travail en profondeur, surtout dans les périodes de crise, sur qui nous sommes, les valeurs de la marque, son positionnement par rapport à la concurrence, sa petite voix différenciante. Et une fois que nous sommes tous d’accord, tout le reste découle. Donc pour moi c’est véritablement la base.

Et aussi ça passe par communiquer – partager – rassembler ; il ne s’agit pas que du top down mais d’associer tout le monde, écouter tout le monde même en respectant bien évidemment les responsabilités et les niveaux hiérarchiques de chacun, mais en embarquant tout le monde et en s’assurant en permanence que personne ne soit resté sur le bord de la route ; car s’il y a une personne qui est resté sur le bord de la route, le projet de transformation échouera.

La covid a-t-elle été un frein ou un accélérateur ou les deux pour votre business ?

La covid a été un formidable accélérateur, ca a véritablement validé et accéléré la feuille de route que j’avais proposé à l’équipe, à savoir : accélérer sur le digital, communiquer avec nos clientes de façon encore plus régulière avec des e-mails, mais aussi sur les réseaux sociaux. En fait, Françoise Saget est une marque éminemment émotionnelle et donc nous avons une communauté de fans, que ce soit sur Facebook ou sur Instagram très engagés. Donc ça a été un accélérateur parce que à l’inverse de certains e-commerçants qui ont arrêté de communiquer ou ont ralenti leur communication auprès de leurs clients, nous au contraire on a jugé que c’était le moment. Elles sont toutes seules à la maison, elles ont une période difficile à traverser ; donc on a renforcé la communication, on les a fait rêver avec nos couettes, on a organisé des jeux concours… ce qui fait qu’elles nous ont suivi, elles ont commandé sur Internet et cela nous a permis de franchir un cap sur le pourcentage de commandes sur Internet. En pourcentage de chiffre d’affaires sur Internet, nous sommes passés de 26% en fin 2019 à 35% en fin 2020, donc nous avons franchi une étape.

Et puis, cela a permis également par rapport à l’équipe sur Teams, de revoir les modes opérationnels, d’être plus rapides, plus efficaces, de laisser tomber certaines habitudes anciennes avec beaucoup de support-papier. Nous avons été obligés de changer de process, de faire de grandes réunions de validation de collection par Teams et même si c’était très compliqué ; mais nous y sommes arrivés.

Donc je dirai vraiment que la covid a été un accélérateur et tout le monde a compris que le digital n’était pas un ennemi en interne parce qu’il y avait quand même cette peur, donc il y a eu un changement d’état d’esprit également.

Que reste-t-il à faire pour terminer la transformation engagée de l'entreprise ?

C’est un « working progress » permanent mais nous voulons franchir une étape dans la modernisation du style de nos produits tout en gardant l’ADN de notre marque parce que nos modèles de produits donnent beaucoup d’importance à tout ce qui est de la nature par exemple. Nous avons aussi un traitement narratif c’est-à-dire que nous essayons de raconter une histoire, de faire voyager nos clientes. Donc tout en gardant cet ADN narratif avec une importance grande accordée à la nature avec les feuilles, les fleurs… nous réfléchissons sur comment moderniser ce style, intégrer toutes les tendances actuelles… donc c’est un gros travail qui a été commencé en 2018 et qu’on ne cesse de pousser.

Pour l’instant on estime avec l’équipe que nous sommes à la moitié du chemin, et nous sommes également en pleine réflexion par rapport au fait de renforcer certaines catégories de produits, en diminuer d’autres… nous sommes dans une réflexion globale sur l’offre produit et style. Donc nous avons encore ce travail à faire. Également pousser et améliorer les performances de l’acquisition et de la fidélisation digitale, étant donné que de nos jours le premier canal externe de recrutement de clients est Internet. Donc il faut encore améliorer les performances et que ces clientes digitales que nous avons séduites une fois, que nous puissions les garder dans la durée.

Et enfin être une marque engagée aussi bien dans la sélection de produits, soit essayer d’avoir de plus en plus de matières écoresponsables, avoir une chaine d’approvisionnement qui améliore son bilan carbone. Également une marque engagée socialement : nous avons un partenariat régulier avec l’association Joséphine qui aide les femmes en situation de précarité. Nous tenons véritablement à être présent aux côtés de cette association dans la durée. Nous travaillons également avec une association bretonne qui s’appelle les Mamansables et qui a pour mission de proposer des ateliers à la fois ludiques et pédagogiques pour nettoyer les plages, qui expliquent comment les déchets arrivent sur les plages.

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